9.1.10

Lost in translation - Part 1

Avant de commencer à lire, merci de bien vouloir vérifier que vous avez branché le son et monté suffisamment le volume. C'est fait ? Ok, alors c'est parti. J'en étais resté à vous souhaiter de bonnes fêtes avant de partir pour Managua, direction le Panama et la Colombie. Sauf que sur le chemin de la gare de bus je me suis fait braquer par 3 types avec un couteau qui avait tout d'une machette. Résultat, plus de carte de crédit ni passeport ni affaires. La situation avec le recul me fait repenser à l'un des premiers articles de ce blog dans lequel je prenais un malin plaisir à décrire la sensation de légèreté pour ne rien avoir dans les poches, ni clés ni portable etc ... Et bien cette fois-ci c'était un peu la même chose mais en moins agréable !

Du coup, retour à Bluefields après une brêve halte à l'ambassade pour obtenir un nouveau passeport. Je suis arrivé à Bluefields pour noël, pas mécontent au final de le passer à Bluefields où les fêtes de fin d'année sont l'occasion de bien belles fêtes ambiance familliale. Et après avoir emprunté à droite et à gauche un peu d'argent, départ à nouveau mais cette fois direction le nord. J'avais pu récupérer un nouveau passeport, mais perdu mon vol pour la Colombie et billets de bus pour le Panama. Et comme un autre volontaire avait prévu un voyage qui était mon plan B original, on est donc partis ensemble pour des vacances improvisées dans la RAAN.

Au final, j'avais prévu de passer noël à Bogota et le nouvel an à Panama, noël aura été à Bluefields et le nouvel an naufragé quelques-part au milieu de nulle part. Mais n'allons pas trop vite. On a d'abord pris une panga depuis Bluefields pour Tasbapauni, une communauté Créole et Miskita où j'étais déjà passé brievement avec blueEnergy, au large de la Lagune de Pearl Lagoon. Très sympa, très jolie, les gens y sont paisibles et passionés de Baseball comme sur le reste de la Côte. Nous avons eu le privilège d'y assister à la fois à un chouette tournoi féminin, et à une belle prise d'un requin Tigre d'environ 4 mètres de long.

Les tortues de mer sont aussi des prises courantes, la plupart venant se reproduire dans l'embouchure du Rio Grande. Une nuit où nous étions à Tasbapouni, environ une cinquantaire d'entre elles ont été capturées. Les agents de la Marine présents dans la communauté vérifient la taille (1 mètre de long minimum environ), et les femelles en principe ne peuvent être pêchées. Pour être complet, les tortues attrapées sont des tortues vertes, et apparemment ce sont les Carey qu'il est interdit d'attraper. Tout celà est-il vraiment respecté ? J'en doute plutôt, même s'il est toujours dur d'en juger en tant qu'étranger.

Les tortues une fois rapportées dans la communauté sont ensuite gardées vivantes sur le dos jusqu'à être dépecées et vendues.

A Tasbapauni, on trouve peu d'activités mais on y pratique quelques sports, la preuve en photos ci-dessous (j'avais dit que les Nicas adorent la boxe):

Un match de Baseball féminin ambiance bonne enfant:


Une photo du cimetière ci-dessous montre les différences de niveau social - assez troublantes - certaines personnes n'ont pas les moyens de payer une pierre tombale, ne serait-ce qu'un bloc de ciment. Le cimetière reste pourtant très bien entretenu, les gens étant très religieux dans ce coin.

Depuis Tasbapauni, nous avons pris une nouvelle panga pour rejoindre la Desembocadura del Rio Grande, à la limite entre RAAS et RAAN (Régions Autonomes Atlantique Sud et Nord). Cette fois on est en territoire Miskito. On y parle quasiment exclusivement Miskito, et un peu d'Ulua. L'une des personnes que l'on a connues le jour du tournoi de Baseball et dont la soeur est la vice-mairesse de Pearl Lagoon nous a emmenés à Kara où elle avait de la famille. Kara est une petite communauté au bord du Rio Grande, d'où il est possible de rejoindre Karawala, la communauté principale de la zone avec Sandy Bay Sirpi.

Les gens cultivent du riz dans ces communautés de l'embouchure du Rio Grande. Ci-dessous le séchage et ensuite passage au pilon pour enlever l'enveloppe.


Nous sommes entre temps passés par la Barra de Rio Grande, une autre communauté située juste à l'embouchure du fleuve, où nous avons changé de bateau pour rejoindre Karawala dans une pirogue cette fois.

A Karawala nous avons trouvé un chouette guide, Ferdinand (Fernando) qui nous a accompagnés pour une petite marche à travers la Savanne (c'est comme çà qu'ils appellent ce coin qui effectivement resemble étrangement à la Savanne Africaine) jusqu'à la petite communauté de Walpa où nous avons pris une autre pirogue pour rejoindre Sandy Bay Sirpi par une petite rivière. La zone est très belle et bien préservée. Nous y avons vu un petit crocodile et quelques singes autour de la rivière. Sandy Bay Sirpi est la plus grande communauté du coin avec plus de 3000 habitants. Les communautés sont reliées par un réseau électrique alimenté par un générateur électrique qui fournit seulement 3 heures d'énergie par jour. Des rumeurs de projet hydro-électrique pour ces communautés courent mais il est toujours difficile ici de séparer runeurs de projets réels.

Nous sommes restés 3 jours à Sandy Bay Sirpi, en attente d'une panga pour Puerto Cabezas, la ville principale de la RAAN. Au programme, 5 heures de panga dans une mer formée pour au final finir naufragés sur la plage ! Le moteur est tombé en panne, et nous avons donc fini le chemin à pied, une heure et demi de marche de nuit sur la plage pour rejoindre la petite communauté de Wawa. Avant celà je mentionne juste une très belle communauté où nous avons fait escale (volontaire celle-là): Wouhnta.


C'est sans doute la plus belle des communautés que j'aie visitées au Nicaragua, mais comme beaucoup des petites communautés de cette partie de la côte, tout projet touristique est impensable en raison de l'insécurité qui y règne. Peu de temps avant que l'on arrive dans la zone avait eu lieu une mini-guerre entre l'armée et les narco-traffiquants et les gens qui les soutiennent (c'est-à-dire à peu près tout le monde dans ces communautés). Pour ceux qui parlent espagnol, je vous mets un lien du journal El País qui en parle.

Nous sommes arrivés à Wawa de nuit, vers 19 heures, à l'heure où tout le monde sortait à la messe pour le nouvel an. Il faut dire que dans cette communauté Miskita comme dans pas mal d'autres on y donnait des messes toute la journée en ce réveillon de nouvel an, et les gens y assistent avec autant de ferveur qu'ils se livrent au Rhum ensuite. Il est vraiment dur de se faire une opinion sur les Miskitos, ils sont pour le moins durs à cerner et on est pour ainsi dire au royaume des faux-semblants. Pour résumer, dans la pupart des communautés Miskitas que nous avons visitées, la moitié des gens sont extrêmement accueillants et bienveillants, et l'autre moitié sont plutôt cinglés, avec parmi eux bon nombre qui se promèment armés. La drogue qui transite presque librement et l'alcool n'aident pas. Toujours est-il que la personne qui a accepté de nous loger à Wawa nous a fortement déconseillés de sortir trop tard, et le lendemain nous avons compris pourquoi. Cette personne d'ailleurs était juge, et a passé la nuit complète à vomir ses tripes à quelques pas de nous. Je passe sur d'autres personnages que nous y avons rencontrés, mais chacun mériterait bien un article à part entière.

Enfin, après avoir écouté bon nombre de commentaires sur l'histoire de la mini-guerre avec les narco-traffiquants, on a appris qu'environ une tonne de cocaïne flottait dans le coin, ce qui rendait les gens un peu nerveux, et nous n'avons pas attendu plus pour finir notre périple vers Puerto Cabezas. La ville est la capitale de la RAAN, et n'a pas vraiment d'intérêt en soit. C'est ce que nous avons découvert en arrivant le premier janvier pour trouver une ville vide, tout le monde ayant décidé d'aller s'oxygéner vers les plages en dehors de la ville, les poches vides après avoir dépensé les derniers cordobas en rhum et feux d'artifice.

Nous y avons rencontré l'ancienne maire, qui en plus de nous avoir offert des T-shirts de Yatama, le parti politique indépendantiste Miskito dont elle est membre, nous a gentiement offert de nous emmener dans son pick-up jusqu'à Waspam, au bord du Rio Coco à la frontière avec le Honduras et faisant partie de la Biosphère de Bosawas. Sur la route que des pins Caribea, dont la plupart n'ont que quelques années, le coin ayant été complètement ravagé par l'ouragan Félix en 2007. Waspam est une petite ville bien agréable, dans un très beau coin mais où rien n'existe pour développer le tourisme, aucune infrastructure. Dommage car on espérait pouvoir rejoindre à nouveau la côte mais par une toute petite piste (pas de routes goudronées dans la RAAN) qui débouche sur une communauté au nord appelée Bismuna. Mais seuls quelques camions en viennent de temps en temps, et cette fois aucun à l'horizon. Les vacances touchant à leur fin déjà, nous avons décidé de retourner à Puerto Cabezas pour y retrouver une amie Nicaraguayenne qui y travaille pour Médecins du Monde. Ensuite, l'autre volontaire a rejoint Bluefields par la mer à nouveau, et moi par l'intérieur via Managua.

Cette fois les vacances sont bien finies, et je vais à présent pouvoir commencer à renouveler ma garde-robe ... pour la deuxième fois ! On dirait que le Nicaragua s'acharne à me défaire de tout concept de propriété. Heureusement la vie en communauté a du bon de ce côté car elle permet d'enprunter les vêtements d'autres volontaires. D'ailleurs je crois que j'ai perdu plus d'affaires comme çà qu'à travers les vols que j'ai subis depuis que je suis ici. Et puis après tout, mieux vaut être pauvre mais sous les Tropiques comme disait la chanson !