23.5.10

Rythmes et Couleurs: Palo de Mayo 2010

Le temps passe, et après 3 mois au sec les nuages chargés d'électricité sont de retour, juste à temps pour le carnaval qui doit consacrer l'arrivée officielle des pluies. L'électricité descend alors du ciel pour se transmettre aux corps ruisselants et exaltés, c'est l'énergie du Palo de Mayo.

La musique vous la connaissez déjà un peu, j'en distille régulièrement quelques extraits dans ce blog à vocation multimédia. Elle peut prendre plusieurs formes, cette fois j'ai choisi celle qui me fascine le plus, la musique Punta. La musiques des Garifunas du Honduras et d'Orinoco, cette même communauté dont je parle souvent, autant en terme de travail que pour l'intérêt du lieu et de sa culture.

Et puisque l'on parle d'énergie et de musique Garifuna, j'ouvre une parenthèse pour parler à nouveau d'Orinoco, et faire la différence entre développement énergétique et développement humain. Orinoco est dotée d'un mini-réseau alimenté par un générateur diesel. Les gens disposent ainsi d'un service électrique de 12 heures par jour, enfin c'est ce que disent du moins les chiffres. L'autre face de la réalité est un taux de 50% de non-paiement des gens connectés, malgré la subvention de l'énergie dérivée du pétrole à plus de 75%.

Même si la communauté n'est pas parmi les plus pauvres de la côte, ses ressources naturelles (bois et poisson) se sont affaiblies et la mentalité de consommation s'est développée en même temps que le transport. Résultat, les gens achètent à présent leur poulet et légumes depuis Managua au lieu de les produire eux-mêmes. Pourtant, la communauté reconnait qu'elle pourrait cultiver une superficie deux fois supérieure à celle actuelle sans déforester. Mais les jeunes ne veulent plus travailler la terre, ils préfèrent conduire une panga ultra-puissante ou revendre n'importe quoi, tant qu'il y ait des gens pour y acheter. Imaginez que la plupart des jeunes y ont un téléphone cellulaire alors qu'il n'y a pas vraiment de réseau. Mais avoir un portable qui coûte plus que le salaire de ses parents, ça permet de cultiver cette image que tous les jeunes poursuivent à travers le monde.

Parfois c'est le contraire, comme par exemple dans le territoire Rama. Là-bas pas de réseau du tout ni d'électricité, donc pas de portables. En revanche, le Gouvernement Territorial indigène lui demande à ce que l'on destine les fonds internationaux au développement d'une production agricole respectueuse de leurs traditions ancestrales, ce qui ne convainc pas du tout les organismes de développement qui pensent eux plus en termes de marché et de globalisation. Et il y a ici une discussion assez intéressante. Le Gouvernement Territorial veut que les gens puissent produire leurs produits de façon traditionnelle et viable, alors que les bailleurs de fonds veulent eux développer le tourisme afin d'augmenter les indicateurs économiques du pays, notamment en développant le commerce entre la côte Atlantique et la capitale du côté Pacifique. Autrement dit, créer des devises pour que les gens puissent acheter leur poulet à Managua comme tout le monde plutôt que les aider à rendre viable l'élevage de leurs poulets et à préserver leurs traditions.

J'imagine que certains des gens qui croient en ce schéma libéral comme unique solution le font de bonne foi, en pensant que la qualité de vie se mesure uniquement en dollars. Et c'est aussi l'un des enjeux que de définir des indicateurs du développement qui ne soient pas basés sur un schéma de développement purement libéral mais sur des valeurs qui respectent les valeurs et traditions de tous les peuples et cultures.

Parfois le développement celà commence par apporter la lumière. Mais la lumière ça ne remplit pas la marmite, alors en parallèle il est nécessaire d'aider la communauté à développer des projets productifs et le transport, ce qui va lui permettre de développer un marché interne, l'organiser, pour ensuite développer un marché externe.

Et parfois comme dans le cas d'Orinoco, l'énergie existe déjà et permet d'alimenter certaines micro-entreprises. Mais il reste à les rendre rentables, et à sensibiliser les gens sur le lien entre économie et environnement. Mais de tels projets peuvent avoir un réel impact s'ils fonctionnent, transformant la communauté en une plateforme pour le développement des communautés plus petites aux alentours. On appelle celà créer un éco-système, dans lequel on cherche les complémentarités. Les petites communautés ont généralement les ressources naturelles, les grandes l'énergie et le savoir-faire pour les exploiter. Reste à faire marcher le tout, ce qui implique générealement de faire s'assoir ensemble nombre d'institutions et partenaires. C'est ce que à blueEnergy on appelle le rôle de catalysateur.

Mais revenons au Palo de Mayo. Comme tout carnaval on y trouve de tout et pour tout le monde, et le catalysateur ici c'est la musique et la danse. Et tout le monde en profite, les parents mais aussi les enfants.

Lors du carnaval, tout est permis, le but étant de s'amuser tous ensemble et d'oublier ses problèmes.

Et bien sûr pas de carnaval sans l'élection de sa Miss. Chaque comparsa qui parcicipe au Palo de Mayo élit sa candidate au titre de Miss Palo de Mayo.

Palo de Mayo c'est donc un défilé des différentes comparsas qui dure toute l'après-midi du dernier samedi du mois de mai, et sera suivi par Tululu, le lundi soir. Tululu c'est le défilé final où toute la population de Bluefields défile au son des tambours, et danse jusqu'au boût de la nuit pour remercier la déesse de la fertilité et l'arrivée de la pluie.



Et en live voilà une idée de ce que celà donne ... de nuit, puisque le défilé commence à 22 heures.



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